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Conférence EMI 2017 : risettes et reset

mardi 24 janvier 2017, par Florian Reynaud

Les 9 et 10 janvier 2017, à Lyon, s’est tenue la conférence nationale « Cultures numériques, Education aux médias et à l’information », inscrite dans le Plan national de formation (PNF) du Ministère de l’Éducation nationale [1]. Cette conférence faisait suite à celle de 2013, dans le même amphithéâtre Mérieux de l’ENS de Lyon [2].

La présentation de l’Emiconf 2017 en donne les objectifs, après une introduction classique sur l’augmentation des outils et instruments numériques et la nécessité de former des citoyens dans une nouvelle société marquée par ce développement. « L’enjeu est ainsi d’assurer à chaque élève une éducation aux médias et à l’information qui soit une voie d’accès efficace aux savoirs et un vecteur de leur partage et que chaque enseignant puisse contribuer à cette éducation. » Il s’agit d’associer l’ensemble des disciplines d’enseignement pour « faire le point sur les questions d’éducation aux médias et à l’information ».

A l’issue de cette conférence, plutôt qu’un compte rendu de plus [3], d’autant plus inutile que les contenus et propositions étaient absents de ces deux journées, il convient de questionner le mot d’ordre de ce plan de communication préparé dans l’urgence, en s’attardant ensuite plus particulièrement sur ce qui a été fait de l’éducation aux médias et à l’information (EMI) et de son histoire à l’occasion de ce non-événement. Une mise en perspective avec la publication du nouveau cadre de référence des compétences numériques (CRCN) est enfin la bienvenue, tant elle suit de près cette conférence.

Le ridicule de la transversalité, ou la verticalité subie

En avril 2016 était annoncé le plan national de formation pour l’année scolaire 2016/2017 [4], avec, dans une rubrique « L’école à l’ère du numérique », l’item « Éducation aux médias et à l’information », avec pour objectif de former les personnes ressources. Celles-ci sont une délégation de cinq ou six personnalités de chaque académie, en théorie, inspecteurs, chefs d’établissement, formateurs et enseignants en charge de formation. En plus, dans l’académie de Lyon, organisatrice avec l’IFÉ et la DANE, les référents numériques ont notamment été invités par le biais de leurs chefs d’établissement, sur inscription libre, puis il leur a été proposé de demander des ordres de mission pour les deux journées. Les professeurs documentalistes, eux, ont dû se contenter d’une invitation directe, sans soutien auprès de leurs chefs d’établissement pour obtenir une absence afin d’assister à la conférence. La DANE de Lyon est particulièrement en charge des formations relatives à l’EMI, soutenant à tout prix le principe de sa transversalité, dès avant cette conférence.

C’est la même perspective qu’on retrouve dans la présentation officielle du PNF, avec une inclusion de l’EMI dans les « cultures numériques », comme en 2013, avec toutefois une différence de taille avec la conférence précédente, l’absence remarquable de comité scientifique en 2017, que l’on perçoit dans l’absence de fil, de progression, tout au long de ces deux journées. S’il était bien question ici de « clarifier les visées et de réfléchir à ses formes diverses de mise en œuvre dans l’enseignement et dans l’ensemble des démarches éducatives », ce qui n’a pas été fait à l’issue du PNF, la question se pose de la sous-représentation des chercheurs en Sciences de l’information et de la communication ou en Sciences de l’éducation. A contrario, le dossier de veille de l’IFÉ, publié en janvier 2017 et distribué à tous les participants à la conférence, ne rentre dans le sujet essentiellement que par des références scientifiques, sans aucune mention d’actions menées sur le terrain ou d’initiatives de groupes professionnels au sujet de l’EMI (le CLEMI étant cité alors seulement pour son rattachement très nouveau à l’EMI) [5].

Si l’on rentre dans le vif du sujet, enfin, dans la succession décousue des allocutions, conférences et tables rondes des deux journées, ce sont deux mots d’ordre qui s’affirment : l’EMI, lors de cette conférence, c’est un dispositif transversal et cela concerne exclusivement l’éducation aux médias, l’info-news, sans grandes considération pour l’info-data et encore moins pour l’info-knowledge...

La transversalité de l’EMI, c’est la marotte des quatre allocutions d’ouverture, par Michel Lussault, directeur du Conseil supérieur des programmes (CSP), par Françoise Moulin-Civil, rectrice de l’académie de Lyon, par Mathieu Jeandron, directeur du numérique pour l’éducation (DNE), par Didier Vin-Datich, doyen de l’IGEN Établissement Vie scolaire.

Dominique Boullier, professeur de sociologie, en conférence d’ouverture, traite essentiellement des médias d’actualité, en opposition avec les médias sociaux, dans une démonstration qui souffre peu de subtilité sur l’évolution problématique de notre société au regard de l’évolution problématique des nouvelles technologies, avec un appel à la résistance, dans le cadre scolaire, pour favoriser la déconnexion et la mise en valeur de bonnes pratiques. Cette proposition, qu’on y soit opposé ou non, qu’on trouve la démonstration trop simple ou non, aurait pu être intéressante si le programme fut organisé pour questionner les contenus de cette intervention. On en était loin, sans aucune autre logique entre les tables rondes qu’une affirmation de l’éparpillement de l’EMI, car c’est sans doute là une des caractéristiques de cette transversalité tant désirée par le Ministère.

La première table ronde portait sur les médias, avec une mise en valeur de l’éducation aux médias par les entreprises médiatiques mêmes... La deuxième table ronde portait sur l’info-data, sans liens avec aucun autre temps de la conférence. L’approche est alarmiste d’un côté, dithyrambique de l’autre, au sujet de l’Internet, devant un parterre qui observe les transversales ainsi dessinées sans mot dire. On nous apprend que les algorithmes sont une belle notion transversale, dans l’EMI, alors que cette notion, en réalité, a été « disciplinarisée », en mathématiques, sans que ce soit d’ailleurs a priori une erreur, et sans qu’elle apparaisse dans le référentiel EMI à proprement parler.

La troisième table ronde, pour clore la première journée, vient proposer des approches internationales. Avec l’OCDE on retiendra que les enseignants ne sont globalement pas doués avec le numérique. Puis, Patrick Verniers et Normand Landry, respectivement président du Conseil supérieur de l’Éducation aux médias de la fédération Wallonie-Bruxelles et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en éducation aux médias et droits humains, insistent sur la réalité de la transversalité de l’éducation aux médias en Belgique et au Québec, mais aussi des limites importantes de cette transversalité, qui est une raison majeure de l’échec de cette « éducation à ». L’EMI est alors totalement écartée des débats en sa globalité, l’info-news est seule reine.

Le lendemain matin, en introduction de la quatrième table ronde, « l’EMI à la croisée de pratiques innovantes », Catherine Becchetti-Bizot, IGEN Lettres, semblera confondre systématiquement les trois expressions de numérique, d’éducation aux médias (EAM) et d’éducation aux médias et à l’information (EMI), avec un appel d’autant plus fort à la transversalité. Quand Vincent Audebert, IA-IPR SVT dans l’académie de Créteil, se permettra de recentrer le débat sur l’information, notamment sur le document, notion particulièrement investie dans cette discipline, avec des collaborations riches avec les professeurs documentalistes, trouvant dommage que cela « percole » encore peu, il se verra recadré pour revenir au sujet supposé par les deux animatrices, à savoir l’éducation aux médias et ses problématiques info-news...

L’éducation aux médias et à l’information, ou la négation de l’histoire de l’éducation

Le dossier de l’IFÉ, certes incomplet, n’oublie pas l’histoire de l’éducation aux médias et à l’information, complètement évacuée de la conférence. Les enseignants d’autres disciplines que la documentation connaissaient-ils alors le développement de l’information-documentation dans les vingt ou trente dernières années ? Pouvaient-ils regretter qu’on développe des problématiques déjà anciennes comme si elles n’avaient jamais été abordées ? On peut en douter. Si ce n’est Vincent Audebert, personne n’a mentionné une quelconque expérience du passé, une quelconque stabilisation des pratiques, à développer encore, notamment avec les professeurs documentalistes. Gilles Sahut a pu évoquer des pistes pédagogiques, mais le temps manquait [6]. Christophe Poupet a pu mentionner le sujet du copier/coller, mais sans le remettre dans un contexte de recherche, depuis 2008 notamment, ou dans un contexte de pratiques, avec un vivier de professeurs documentalistes qui a pris cœur à questionner cette réalité de pratique informationnelle pour la mettre en avant et l’interroger avec les élèves [7].

Pire encore, lors de la cinquième table ronde, « ressources et dispositifs EMI pour soutenir la formation professionnelle des enseignants », personne n’a mentionné le référentiel de compétences professionnelles publié en juillet 2013 [8], pas même Vincent Liquète, pourtant professeur des universités, en ESPÉ Aquitaine. Alors que ce texte réglementaire inscrit les professeurs documentalistes comme responsables, de par leur formation, du développement de la culture de l’information et des médias chez les élèves, et clairement en tant qu’enseignants à part entière, non pas en tant qu’animateurs ou ingénieurs pédagogiques, on ne peut qu’être surpris de voir qu’il soit déjà considéré comme de l’histoire ancienne par des personnalités compétentes dans le domaine, sans aucune mention pendant les deux journées. Vincent Liquète, au lieu de cela, soutient le principe d’une ingénierie pédagogique en établissement pour l’EMI. Et depuis Bordeaux encore, on se targue d’avoir fait en sorte que les professeurs documentalistes, formés initialement pour former les élèves à l’information-documentation ou culture de l’information et des médias, soient amenés à former, pendant une demie journée, leurs collègues enseignants qui n’ont pas reçu de formation initiale dans ce domaine, pour que ceux-ci enseignent la culture de l’information et des médias à la place des professeurs documentalistes...

Quand bien même le thème de l’innovation est à la mode dans l’Éducation nationale, surtout du côté des services centraux, des hiérarchies académiques, cette manière de faire table rase du passé ne manque pas de surprendre. Nous ne retrouvions pas cette tendance en 2013, pour la conférence du même titre. Au-delà d’une tendance nouvelle, il s’agit d’un objectif.

Si le choix de l’éducation aux médias et à l’information s’est opéré pour traduction de la media and information literacy, c’était du fait de l’existence du CLEMI en France. C’était un problème, ça l’est encore, mais cela n’empêchait pas alors de comprendre que la media and information literacy relevait en priorité d’apprentissages associés à la notion d’information, avec un écho important pour la France dans l’expression utilisée d’information-documentation. Mais depuis, la DNE s’est emparée de l’EMI, avec une entrée essentiellement numérique. Mais depuis, l’IGEN-EVS, en charge de la documentation, selon des provenances managériale ou économiste, a continué de réduire l’importance de la mission d’enseignement des professeurs documentalistes, lui préférant une évolution dans l’ingénierie pédagogique ou dans l’accompagnement.

Dans ce contexte, cette conférence du PNF venait pour présenter la réinvention de la roue, la clôture d’une boucle, pour tout recommencer de zéro. On aura entendu lors de ces journées que l’EMI était jeune, qu’elle était transversale par essence, sans aucune réflexion sur les équilibres à trouver entre des apprentissages spécifiques, rendus obligatoires par le Loi pour la refondation de l’école de la République [9], et des approches transdisciplinaires, possibles à certains égards, en complémentarité de ce que doivent faire les professeurs documentalistes, en collaboration parfois.

Oubliées les origines de l’éducation aux médias et à l’information. On peut douter même que les animateurs des tables rondes aient consulté les programmes de cette éducation aux médias et à l’information, au-delà de leur genèse. Oublié le respect envers les compétences professionnelles des professeurs documentalistes, parfois par certains enseignants d’autres disciplines qui, peut-être sans s’en soucier véritablement, de ces compétences, estiment que l’EMI est en effet un domaine transversal, qui ne demande pas plus de formation que cela, qui devrait se faire sans souci tant qu’on en a envie. On appréciera tout de même le retour d’expérience de Lionel Vighier [10], qui aura à cœur de ramener son travail à un objectif disciplinaire, la rhétorique. On retrouve là une éducation par les médias, et non pas une éducation aux médias et à l’information, une approche de la culture de l’information et des médias, en somme, au service de la discipline, sans généralement de considération pour des apprentissages spécifiques, même si le travail de Lionel Vighier, à cet égard, fait peut-être exception.

Oubliée l’information-documentation, lors de cette conférence. Évoqués les professeurs documentalistes, seulement. Si certains ateliers ont dû permettre d’envisager des pistes, autour de projets concrets, c’en sont quatre sur seize, dans le titre. Un atelier filé sur les deux jours, autour du « cadre de référence » de l’EMI, selon le titre, fut sujet de tensions, avec une consigne de travail problématique : révéler aux enseignants ce qu’ils font en EMI sans le savoir...

Quand les compétences s’ajoutent aux compétences, ou le pari de l’incompétence

Tant qu’à œuvrer pour la transversalité, le Ministère de l’Éducation nationale, avec l’aval de plusieurs syndicats et avec l’aval des fédérations de parents d’élèves, va jusqu’à proposer une surcouche à l’éducation aux médias et à l’information, en abandonnant le B2i, brevet informatique et Internet, pour un « cadre de référence des compétences numériques » (CRCN), publié sous forme de projet au début du mois de janvier 2017 [11].

L’objectif est de développer des attestations à partir de l’année 2017/2018, avec un référentiel qui comprend cinq domaines : information & données, communication & collaboration, contenus, protection & sécurité, environnement numérique. Ce référentiel a priori se dégage des « programmes », avec des domaines issus d’un rapport au sein de la commission européenne [12].

On notera certaines libertés prises au sujet des domaines et sous-domaines présentés vis-à-vis de ce qui est écrit dans le rapport original :

  • « Evaluating information » devient « Gérer des données » dans la version française, dans le domaine « Information & données »
  • Plusieurs sous-domaines ne sont pas repris : « Engaging in online citizenship », « Netiquette », « Managing digital identity », dans le domaine « Communication »
  • L’entrée « S’insérer dans le monde numérique », qui semble recouvrir les trois sous-domaines précédents, s’inscrit dans le domaine « Protection & sécurité » plutôt que dans le domaine « Communication »
  • Le 5ème domaine est une curiosité d’adaptation, avec trois sous-domaines mis de côté (« identifying needs and technological responses », « innovating and creatively using technology » et « identifying digital competence gaps »), avec un domaine « environnement numérique » qui reprend « solving technical problems » et ajoute « évoluer dans un environnement numérique »

Le document d’appui s’occupe essentiellement de compétences procédurales, mais en comprenant toutefois des knowledge examples, avec trois niveaux d’exigence et d’évaluation des compétences : foundation, intermediate, advanced. En France, au-delà des libertés prises avec les contenus, huit niveaux sont identifiés, notamment les niveaux 2 et 3 qui, dans le contexte scolaire, correspondent à la fin du cycle 3 et à la fin du cycle 4. C’est l’essentiel du rapport de la commission européenne que de préciser les attentes de chaque sous-domaine. On pourra constater de grands divergences dans les attentes entre le rapport et le cadre de référence français, mais ce n’est sans doute pas le sujet ici que d’affirmer qu’il est d’usage de prendre appui sur un travail international pour donner légitimité à un projet, tout en prenant des distances claires avec ce travail. Il en va de même du transfert de la media and information literacy de l’UNESCO vers l’éducation aux médias et à l’information du CLEMI ou de la DNE. Notons enfin que le rapport ne traite en aucun cas des responsabilités enseignantes à l’égard des compétences numériques.

Le lien avec l’éducation aux médias et à l’information se trouve dans le référentiel EMI [13], dont nous pouvons rappeler ici quelques grandes lignes :

« Tous les professeurs, dont les professeurs documentalistes, veillent collectivement à ce que les enseignements dispensés en cycle 4 assurent à chaque élève :

  • une première connaissance critique de l’environnement informationnel et documentaire du XXIe siècle ;
  • une maitrise progressive de sa démarche d’information, de documentation ;
  • un accès à un usage sûr, légal et éthique des possibilités de publication et de diffusion. »

Tous ces objectifs, on les retrouve dans le cadre de référence des compétences numériques, spécifiquement sur le numérique, en surcouche, donc, du référentiel EMI. Quel intérêt, alors, d’un nouveau cadre de référence, notamment dans le cadre scolaire ? Sans doute aucun. Quelle lisibilité, pour les élèves, pour leurs parents ? Sans doute aucune. Quelle cohérence pour les enseignants ? On ne sait déjà pas qui doit faire quoi, la question n’en est même donc pas à la cohérence politique d’un tel brouillage. Et pour faire simple, on ne retrouvera aucune compétence de l’EMI dans le CRCN, ce dernier mêlant littératie informationnelle et littératie numérique sans aucune clarté, laissant de côté la littératie médiatique qu’on retrouve aux côtés de la littératie informationnelle, avec un peu de culture numérique, dans l’EMI... Last but not least, alors que le référentiel EMI oublie les notions info-documentaires, disparues depuis le projet de septembre 2015 dans la publication officielle de novembre 2015 [14], le CRCN les introduit sous forme de « thématiques associées » à chaque sous-domaine, le terme de thématique permettant de mélanger concepts et expressions diverses et variées.

Un mot sur l’évaluation enfin, qu’on verra donc effectuée pour l’élève dans son bulletin sous forme de notes, de validations de compétences spécifiques à une discipline ou à l’EMI, sous forme encore de validation du parcours citoyen, de validation du socle commun, en domaines ou en items, ou encore sous forme de validation de compétences numériques... Le Ministère propose, pour le dernier type cité, une plateforme d’évaluation en ligne du CRCN, PIX [15]. La deuxième mouture de cette plateforme ne peut que rendre perplexe tout professionnel de l’information-documentation, tant le mélange et la confusion sont portés en triomphe, comme on retrouve tous les défauts de la répartition par domaine telle que définie dans le rapport de la commission européenne, avec un système d’évaluation très léger, sans correction humaine a priori sur l’essentiel des questions, délaissant toute démarche intellectuelle d’investigation par exemple.

Conclusion :
le brouillage des données plutôt que la clarté des sources ?

Qui fait quoi ? quand ? comment ? Voilà trois questions éludées en matière de développement chez les élèves de la culture de l’information et des médias, d’une part, de la culture numérique, d’autre part, dans la conférence EMI de janvier 2017. Dans le sens d’une translittératie en développement, il existe des liens entre ces trois domaines, mais le brouillage est tel que c’est la confusion qui règne, sans aucun soupçon d’espoir pour les élèves... Dans le nuage de la transversalité, l’heure serait donc de demander à tout le monde de faire trois fois la même chose sans le savoir, sans formation professionnelle, avec des injonctions, en matière d’outils d’évaluation, qui supposent une absence de lisibilité, une validation chaotique de compétences déclaratives et procédurales.

On pourrait presque penser, devant tant de difficultés, qu’il n’y avait pas de solutions, qu’il n’y avait pas de pistes concrètes pour assurer le développement de ces apprentissages, de leur évaluation. Et pourtant si. Mais cela aurait demandé un certain effort, de même que certaines décisions qui n’ont pas l’air facile à prendre quand il n’y a pas la volonté politique, finalement, pour un tel développement. La volonté politique, là, c’est de faire entrer le numérique à l’école, quitte à ce que cela bloque, quitte à ce que cela sature les esprits. Contre le principe de responsabilités claires, celles, partagées, des professeurs documentalistes en première ligne, pour l’information-documentation, des enseignants de lettres et d’histoire ensuite, en matière de littératie médiatique, des enseignants de toutes discipline, en collaboration pour la compréhension des notions informationnelles avec les professeurs documentalistes, enfin des enseignants de technologie pour certains aspects techniques de la culture numérique, c’est au contraire le partage inconsidéré des interventions qui a été choisi.

Il n’est plus question, à certains égards, notamment en ce qui concerne les moyens humains et horaires, d’enseigner la culture de l’information et des médias, mais d’en faire un accompagnement au service des autres disciplines, comme une éducation par les médias, en pensant distiller par là quelques bons conseils, quelque bonne sensibilisation aux dangers, selon des expressions et objectifs qui ne semblent pas vouloir disparaître. Les plus pessimistes diront que c’était maintenant ou jamais, mais que les valeurs économistes du développement numérique ont définitivement ingurgité les valeurs humanistes d’un recul critique à l’égard de notions qui méritent sans doute davantage qu’un traitement communicationnel si malvenu.

Documents joints

Notes

[1Ressources sur cette conférence disponibles sur : http://emiconf.ens-lyon.fr/

[2Ressources sur cette conférence de 2013 disponible sur : http://emiconf.ens-lyon.fr/ressources/conferences/emiconf-2013-1 Compte rendu de cette Emiconf 2013 disponible sur : http://profdoc.iddocs.fr/spip.php?article36

[3Pour deux comptes rendus linéaires sur ces journées, dont on appréciera la titraille : LE BAUT Jean-Michel. Conférence Lyon 2017 : Le grand défi de l’EMI. In Le Café pédagogique [en ligne], 2017. Disponible sur : http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2017/01/12012017Article636198026178011017.aspx et LE BAUT Jean-Michel. Conférence Lyon 2017 : Quand l’EMI transforme l’Ecole. In Le Café pédagogique [en ligne], 2017. Disponible sur : http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2017/01/12012017Article636198026175354784.aspx

[4MEN. Plan national de formation (PNF). In Eduscol [en ligne], 25 avril 2016. Disponible sur : http://eduscol.education.fr/cid46906/plan-national-de-formation-2015-2016.html

[5JOUBAIRE Claire. EMI : partir des pratiques des élèves. In Dossier de veille de l’IFÉ [en ligne], 01/2017, n°115. Disponible sur : http://ife.ens-lyon.fr/vst/DA/detailsDossier.php?parent=accueil&dossier=115&lang=fr

[6On pourra compléter avec un compte rendu de sa thèse, sur ce site : Wikipédia et Vikidia en 2016 : évolutions et pistes pédagogiques. Compte rendu augmenté. In Prof’Doc’ [en ligne], 2016. Disponible sur : http://profdoc.iddocs.fr/spip.php?article59

[7On trouvera quelque preuve du travail récent et moins récent sur l’information-documentation dans le Wikinotions Info-Doc, sur http://apden.org/wikinotions/index.php?title=R%C3%A9f%C3%A9rences_(par_auteur)

[8MEN. Référentiel des compétences professionnelles des métiers du professorat et de l’éducation. Arrêté du 1er juillet 2013. In Education.gouv.fr [en ligne], 2013. Disponible sur : http://www.education.gouv.fr/pid25535/bulletin_officiel.html?cid_bo=73066

[9Loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République. In Legifrance [en ligne], 2013. Disponible sur : https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do;jsessionid=?cidTexte=JORFTEXT000027677984&dateTexte=&oldAction=rechJO&categorieLien=id

[10VIGHIER Lionel. Comme par hasard... In Les élucubrations de @lvighier [en ligne], 2015. Disponible sur : http://blog.crdp-versailles.fr/francaisvighier/index.php/post/12/07/2015/Comme-par-hasard

[11MEN. Projet de cadre de référence des compétences numériques pour l’école et le collège. In Eduscol [en ligne], 01/2017. Disponible sur : http://eduscol.education.fr/cid111189/cadre-de-reference-des-competences-numeriques-pour-l-ecole-et-le-college.html .

[12FERRARI Anusca. DIGCOMP : A Framework for Developing and Understanding Digital Competence in Europe. In JRC Scientific and policy reports [en ligne], 2013. Disponible sur : https://publications.jrc.ec.europa.eu/repository/bitstream/JRC83167/lb-na-26035-enn.pdf

[13MEN. Bulletin officiel spécial n°11 du 26 novembre 2015. Annexe 3. Programme d’enseignement du cycle des approfondissements (cycle 4). In Education.gouv.fr [en ligne], 2015. Disponible sur : http://www.education.gouv.fr/pid285/bulletin_officiel.html?cid_bo=94717

[14A.P.D.E.N. Les professeurs documentalistes dans le nouveau collège : état des lieux en janvier 2016. In Apden.org [en ligne], 01/2016. Disponible sur : http://apden.org/Les-professeurs-documentalistes.html

[15Disponible en version bêta sur : https://pix.beta.gouv.fr/

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3 Messages

  • Conférence EMI 2017 : risettes et reset Le 31 janvier 2017 à 12:06, par Etienne LAMBERT

    Bonjour Florian,

    lorsque je parlais de #désinformation sur Twitter suite au post du GREID infodoc, il ne s’agissait pas tant du contenu de cet article, qui retranscrit assez fidèlement tes impressions (et celles de quelques autres) ainsi que le déroulement de l’#EMIconf2017 ; que de ce raccourci en moins de 140 caractères : "Les #profsdocs partout (ateliers, posters, projets, public) et pourtant évincés d’#emiconf2017".

    En effet, déjà lors de ces journées et davantage encore lorsque l’on relis ton article en forme de plaidoyer pour la sauvegarde du statut des professeurs documentalistes, on s’aperçoit que le corporatisme de certains vient polluer un débat nécessaire sur la transversalité de l’acquisition des compétences en Éducation aux Médias et à l’Information. S’il est nécessaire et même indispensable de s’appuyer sur les professionnels dont tu fais partie, il n’est pas réaliste de penser qu’ils peuvent agir seuls alors qu’ils ne bénéficient ni de temps de face à face institutionnalisé avec les élèves ni d’instructions officielles claires.

    L’#EMI se pratique depuis des années de manière inter, pluri voir transdisciplinaire lors notamment de la Semaine de la Presse et des Médias à l’École (#SPME) pilotée par le CLEMI, elle est aussi le fait de nombreux enseignants de lettres, de sciences, d’arts... et la mise en oeuvre des EPI (plutôt réussie lorsque les établissements et les collègues s’en donnent les moyens) sont une preuve que cette "discipline" ne peut être le pré carré des documentalistes.

    Je regrette également que tu n’aies cité les interventions ni de Jean-François Cerisier de l’Université de Poitiers, ni celle finale de Jean-Marc Merriaux du Réseau Canopé qui revenait précisément sur ce I de information , trop peu abordé, et sur le rôle fondamental des #ProfsDocs.

    Attendons donc les captations de l’IFÉ @ENS_Lyon et pour un compte rendu linéaire à la volée, vous pouvez également vous référer au Moment suivant https://twitter.com/i/moments/818426895721230336

    Bien à vous

    Étienne LAMBERT
    @EtienneFICD

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    • Conférence EMI 2017 : risettes et reset Le 31 janvier 2017 à 12:26, par Florian Reynaud

      Merci. Je précise que je ne suis pas à l’origine de ce fameux tweet. Par ailleurs, j’espère que mon article n’est pas perçu comme un réflexe corporatiste, qui peut être une voie aisée pour décrédibiliser toute revendication, justement pour des capacités d’intervenir avec les élèves, que ce soit seul ou en collaboration. On tournerait en rond à réduire cela à du corporatisme, c’est une manière aussi de ne pas chercher de solutions viables pour un équilibre des interventions en respect des compétences des professeurs documentalistes.

      J’ai fait le choix de ne pas mentionner les deux interventions précisés, en effet.

      Pour la première, elle était tout bonnement hors-sujet. Attention, je ne dis pas que le sujet même de la table ronde n’aurait pu être intéressant relativement à l’EMI. En l’occurrence, les discussions ont été complètement déconnectées de l’EMI. Cela n’avait donc rien à faire dans ce compte rendu, quand bien même Jean-François Cerisier a proposé plusieurs remarques pertinentes, notamment sur la réflexion à mener sur l’existant et son évolution plutôt que sur les nouvelles constructions.

      Pour l’intervention de Jean-Marc Merriaux, il ne s’agissait pas d’une conclusion, mais d’une communication totalement indépendante de la conférence, comme il n’avait aucune connaissance des contenus qui y étaient présentés. Alors oui, elle avait un intérêt, car il a parlé d’éléments qu’il pensait avoir été abordés lors de la conférence, alors qu’ils ne l’avaient pas été. C’eut été alourdir le propos que de préciser cela, d’autant plus avec une très faible portée de son discours.

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